Électro-convulsivo-thérapie (ou Sismothérapie ou Électrochocs)
Pratiquée pour la première fois en 1938 par les psychiatre romains Ugo Cerleti et Lucio Bini, cette technique consiste à provoquer une crise d’épilepsie généralisée, sous anesthésie générale.
Des études récentes ont permis de comprendre une partie du mécanisme des bienfaits des ECT.
Mécanismes d’action
Les ECT semblent agir en activant la genèse de neurones dans l’hippocampe (structure cérébrale impliquée dans la mémoire, les émotions, le contrôle des comportement et dont le volume diminue dans les dépressions).
Ils favorisant également la survie de ces jeunes neurones pendant leur processus de maturation jusqu’à l’âge adulte et l’intégration de leur place dans le réseau neuronal (ce processus dure Quatre semaines).
Les ECT augmentent la synthèse de facteurs de croissance (Brain Derivated Neurotrophic factor, Vascular Endothelial Groth Factor,…).
« Les ECT peuvent induire également d’autres mécanismes de plasticité neuronale comme la modification des connexions des nouveaux neurones et plus particulièrement l’unité responsable de ces connexions, les épines dendritiques. »
« Les ECT et les antidépresseurs ont des cibles communes et notamment la neurogénèse adulte hippocampique. Mais ces deux traitements ont une forte différence dans la rapidité d’action. En effet, les ECT sont utilisées majoritairement pour leur action rapide nécessaire dans les situations d’urgence. Une possible explication à cette différence de décours temporel sur la symptomatologie de la dépression, pourrait être que chaque traitement va moduler la neurogénèse adulte différemment. Les ECT comme les antidépresseurs augmentent la prolifération des progéniteurs mais il semblerait que seul les ECT soient capables d’avoir une action directe sur l’intégration des nouveaux neurones permettant d’obtenir l’effet bénéfique de manière rapide. Les antidépresseurs quant à eux pourraient n’agir que sur la prolifération et les neurones nécessitant 4 semaines pour s’intégrer, les effets bénéfiques seraient beaucoup moins rapides. » 1,p.147s
Indications
- Dépression caractérisée sévère et résistante aux traitements médicamenteux
- Dépressions de la bipolarité si les thymorégulateurs sont inefficaces
- Troubles bipolaires à cycles rapides
- Prophylaxie des rechutes dans les troubles bipolaires
- Dépressions délirantes ou à caractéristiques psychotiques
- État maniaque
- Schizophrénie lorsque les neuroleptiques sont inefficaces et qu’il y a un risque de passage à l’acte suicidaire
Contre-indications
- L’Hypertension Intra-crânienne (HIC) est la seule contre-indication absolue.
- Toutes les autres contre-indications sont relatives (elle n’empêchent pas la réalisation des ECT si les bénéfices attendus sont proportionnés et sous surveillance accrue) : hémorragie cérébrale, infarctus du myocarde récent, anévrisme de l’aorte abdominale, malformation cérébrale, décollement de rétine, pacemaker,…
Bilan pré-ECT
- Consultation classique pré-anesthésie, avec bilan sanguin et Electro-Cardio-Gramme, recherche d’antécédents allergiques, de porphyrie,…
- Bilan dentaire
- IRM ou Scanner cérébral, ou Electro-Encéphalo-Gramme (EEG)
Il est obligatoire de recueillir le consentement éclairé du patient.
Réalisation
Les séances se déroulent sous anesthésie générale brève et curarisation (pour éviter les contractions musculaires qui, dans la crise d’épilepsie, peuvent provoquer des problèmes dentaires, des fractures, des douleurs).
L’ECT consiste à délivrer des stimulations électriques répétées et brèves (de moins de 8 secondes), avec un courant de très faible intensité (0,8 ampère), soit en bilatéral (plus efficace mais donne plus de troubles de la mémoire et de confusion), soit en unilatéral.
On réalise en général 2 à 3 séances par semaines, sur 6 semaines.
Pour plus de 80% des patients, il faut compter en moyenne 6 à 15 ECT pour une cure d’ECT efficace (pour obtenir la rémission). La rémission survient parfois plus tôt, parfois au-delà de 15 ECT.
Dans les dépressions résistantes, il faut au moins 10 à 12 séances en bilatéral (contre 6 à 8 dans les épisodes dépressifs sévères simples).2
Les effets physiologiques des ECT ne se prolongent pas au-delà des séances. En l’absence de traitement d’entretien quasiment tous les patients rechutent dans un délai de 6 mois après une cure d’ECT réussie. Il est indispensable de mettre en place, avant la fin de la cure, un traitement médicamenteux ou faire des ECT de maintenance (par exemple une séance par mois).
Ceci est encore plus vrai pour les dépressions résistantes.
Effets secondaires
« Le traitement par ECT comporte certains risques. La mortalité (1 pour 10 000 patients traités ou 2 pour 100 000 séances) est comparable à celle liée à l’anesthésie générale pour les interventions chirurgicales mineures. Le taux de morbidité est estimé à 1 accident pour 1300 à 1400 séances : laryngospasme, traumatisme dentaire, luxation ou fracture, défaillance circulatoire ou encore brûlure cutanée au point d’application des électrodes.
Des troubles immédiats (état confusionnel, céphalées, nausées, douleurs musculaires) disparaissent en quelques minutes à quelques heures après la séance d’ECT.
Enfin, l’ECT peut engendrer des pertes de mémoire et de l’orientation, le plus souvent transitoires mais qui peuvent, exceptionnellement, persister plusieurs mois. » (http://www.psycom.org/Espace-Presse/Sante-mentale-de-A-a-Z/Electroconvulsivotherapie-ECT)
Les ECT constituent une ressource thérapeutique majeure, souvent sous-estimée et sous-utilisée (il n’est pas rare de laisser des patients pendant des années avec des traitements médicamenteux inefficaces, alors que des séances d’ECT pourraient les ‘ramener à la vie’).
1 Jonckheere-Ruiz de Larrinaga J., Bases biologiques des effets de l’Électro-convulsivo-thérapie (ECT), Thèse de doctorat, Grenoble, 10 février 2017
2 Gourion A, Gérard A, Dépressions difficiles et dépressions résistantes, Optimisation des stratégies psychopharmacologiques, EM direct, Issy-les-Moulineaux, 2013